C’est en 1907 que Carl Akeley, citoyen américain, inventa la première machine à projeter qu’il breveta en 1909 pour construire, l’année suivante, des faux rochers dans un zoo de Pennsylvanie.
Après avoir construit ces faux rochers, Carl Akeley s’est vite aperçu que son invention pouvait être utilisée pour d’autres travaux.
Cela s’est rapidement confirmé puisque, dès 1911, le béton projeté était employé pour des applications aussi diverses que la stabilisation des berges de la tranchée «Culebra cut» du canal de Panama et la protection contre les incendies (charpentes métalliques de la gare centrale et du pont sur l’Hudson à New York).
D’autres applications de la projection du béton se sont ensuite développées aux USA :
- 1913 : Etanchement sur 1200 ml du «Catskill canal» d’amenée d’eau à New York
- 1914 : Consolidation de parois rocheuses à Brucetown en Pennsylvanie
- 1916 : Revêtement réfractaire à l’intérieur d’un cubilot
- 1917 : Revêtements de galeries de mines
- 1918 : Construction de barges pour la navigation sur le Potomac
- 1918 : Construction de toitures constituées de dômes ou de voûtes minces
- 1922 : Construction de maisons entièrement réalisées en béton projeté.
En France, dès la fin de la première guerre mondiale, le béton projeté a d’abord été utilisé pour réparer des habitations et des ouvrages d’art endommagés par les combats.
Un dessin publicitaire de l’importateur français du matériel américain montre en effet, en 1918, une machine (appelée «cement gun») et un ouvrier en train de projeter du béton pour réparer des maisons qui avaient été bombardées.
-> Machine à sas de première génération encore sur le marché
Dans un autre domaine, la plus ancienne trace d’un chantier important français de béton projeté a été retrouvée dans les archives de la SNCF. Elle concerne la construction du tunnel ferroviaire de Puymorens dans les Pyrénées.
La projection y a été employée de 1919 à 1921, pour consolider, dans certaines zones, les parois excavées et c’est l’importateur des machines américaines qui a réalisé les travaux.
A la lecture de documents d’archives disponibles à la bibliothèque de l’Ecole des Ponts et Chaussées, il apparaît que les services de l’administration des Ponts et Chaussées ont été les premiers à s‘équiper avec du matériel Ingersol Rand appelé alors « cement gun » ou « canon à ciment » pour réaliser des travaux de protection de talus et de bétonnage d’étanchement du canal latéral à la Loire.
On peut constater qu’ensuite et jusqu’au début de la deuxième guerre mondiale, le béton projeté, toujours mis en œuvre avec les mêmes machines, était couramment utilisé, en effet :
- En 1935, pour réaliser 3500 m2 des toits voûtés de l’aérogare du Bourget.
- En 1937, pour la construction du grand rocher du zoo de Vincennes (retour à la source).
- En 1937 également, pour réaliser de nombreux dômes, projetés sur des structures gonflables, destinés à l’exposition universelle de Paris.
- En 1938 et 1939, pour la réalisation de masques amont de barrages, de revêtements de berges et pour la réparation de constructions en béton ou en maçonnerie
Après la guerre, le savoir-faire des entreprises avait pratiquement disparu mais, heureusement, la SNCF et l’EDF savaient encore que le béton projeté existait et avaient conservé des archives de leurs chantiers.
Il est à noter que la SNCF a conservé des équipes de projection de béton jusqu’à la fin des années 1980, de même pour EDF jusqu’à la fin des années 1960, et utilisant toutes les deux des machines du même type que celles imaginées par Carl Akeley en 1909 !
A titre d’exemple, la série de prix de la SNCF comportait, en 1947, des articles concernant le béton projeté et le « cement gun », qui était, à cette époque, surtout utilisé pour la réhabilitation des tunnels et la réparation des ponts en béton armé.
De son côté, après les Autrichiens et les Allemands, EDF a appliqué la « Nouvelle Méthode Autrichienne » dans les Alpes, lors des travaux de l’aménagement hydraulique Arc – Isère.
Cette nouvelle méthode, brevetée en Autriche par M. Rabcewicz en 1948, consiste à remplacer, dès le creusement d’une galerie ou d’un tunnel, les soutènements traditionnels (boisage, cintres) par du béton, projeté directement sur le terrain encaissant.
Les volumes projetés sont alors devenus très importants et EDF a entrepris des recherches, dans son laboratoire d’Albertville, pour améliorer la composition des mélanges à mettre en œuvre. Systématiquement, les courbes granulaires de tous les mélanges qui étaient projetés sur les chantiers des Alpes ont alors été tracées.
L’examen, sur plusieurs années, de toutes ces courbes et leur comparaison avec les résultats des essais sur béton durci ont permis à EDF de tracer les fuseaux optimaux, à l’intérieur desquels les courbes granulaires des mélanges à projeter devaient se situer. Ces fuseaux, qui ont fait largement leurs preuves, sont encore utilisés en France et le seront encore longtemps.
Pendant 40 ans, les machines issues de celles de 1909 ont été les seules sur le marché mais, vers 1950, la mise au point des machines à rotor (appelées également « à barillet » à cause de la ressemblance avec celui d’un révolver) plus puissantes et plus faciles d’emploi, ont contribué à l’essor de la méthode de 1909 qui était appelée « projection par voie sèche ».
Voir aussi : Glossaire béton