Les travaux de fondations spéciales regroupent de nombreux procédés et techniques destinés à la réalisation de fondations d’ouvrages de Génie Civil, de bâtiments et d’infrastructures routières, autoroutières et ferroviaires, d’excavation, de soutènement et de consolidation de sol. Les techniques de fondations spéciales, exécutées par des entreprises spécialisées, ont fait l’objet, ces dernières années, de très nombreuses innovations et évolutions catalysées par le développement et l’optimisation des formulations de nouveaux coulis et de nouveaux bétons, par le perfectionnement des techniques de mise en œuvre, ainsi que par l’automatisation et l’amélioration de la fiabilité et de la précision des matériels de chantier. Toutes ces évolutions ont été accompagnées par un souci constant des fournisseurs de matériaux et de matériels, des entreprises, des maîtres d’œuvre et des maîtres d’ouvrage, d’une prise en compte de plus en plus importante du respect de l’environnement et de l’amélioration de la sécurité des ouvriers sur les chantiers. Les techniques de fondations spéciales nécessitent l’utilisation de matériaux à base de ciment, en particulier sous forme de coulis ou de bétons. Elles peuvent être regroupées en cinq principales familles :
- Fondations profondes
- Injection des sols
- Parois moulées
- Écrans étanches
- Jet grouting.
Table of Contents
Fondations profondes
De nombreux types de fondations profondes sont disponibles pour réaliser les fondations de structures de Génie Civil, telles que, par exemple, des fondations de piles ou de culées d’ouvrages d’art. Elles se présentent sous forme de pieux, de barrettes, de puits ou de micropieux.
PIEUX
- Les pieux sont en général forés. On distingue plusieurs types, selon la technique utilisée pour les réaliser.
- Les pieux forés simples : ces pieux sont réalisés par mise en œuvre du béton de bas en haut à l’aide d’une colonne de bétonnage, après mise en place d’une cage d’armatures dans un forage exécuté
- préalablement sans soutènement des parois.
- Les pieux forés tubés : le maintien des parois est assuré par un tubage métallique provisoire.
- Les pieux forés boue : le maintien des parois est dans ce cas assuré, pendant le forage, par une boue thixotropique à base de bentonite (mélange d’eau et de bentonite).
Après descente dans le forage d’une cage d’armatures, l’excavation est remplie de béton à l’aide d’une colonne de bétonnage.
- Les pieux forés à la tarière creuse : l’exécution est réalisée à l’aide d’une tarière.
- Le béton est mis en place au fur et à mesure de l’extraction du sol par la tarière.
Nota : les pieux peuvent être aussi façonnés à l’avance sous forme d’éléments préfabriqués en béton armé, mis en place par battage ou par vibrofonçage.
BARRETTES
L’exécution des barrettes reprend le principe de celle des pieux forés boue, mais s’en distingue par l’utilisation d’un outil de forage (benne à câbles, benne hydraulique, ou « fraise ») de forme différente, qui confère à la fondation une section rectangulaire.
PUITS
Le creusement des puits est, en général, effectué par des moyens manuels ou de petits matériels d’excavation. Les parois sont soutenues, au fur et à mesure du creusement, par des blindages. Après creusement, la fondation est bétonnée à sec.
MICROPIEUX
Les micropieux sont des pieux de diamètre inférieur à 250 mm.
Le forage est, en général, équipé d’armatures et rempli d’un mortier ou d’un coulis de ciment par gravité, au moyen d’un tube plongeur ou par injection.
Si la nature du sol le permet, des micropieux en béton façonnés à l’avance peuvent être mis en place par battage ou fonçage.
Injection des sols
La techniques d’injection des sols consistent à remplir les vides d’un terrain avec un coulis de caractéristiques rhéologiques adaptées, à base de ciment, afin d’en améliorer principalement les caractéristiques mécaniques et la cohésion, et d’en diminuer la perméabilité. Le coulis est envoyé dans le milieu à traiter à partir de la surface ou à partir d’ou-vrages auxiliaires tels que, par exemple, des galeries ou des puits.
Selon le type de problèmes rencontrés dans le sol, l’injection aura pour objectifs la consolidation, l’étanchement, le scellement, le remplissage ou la compensation.
CONSOLIDATION
Cette technique permet d’améliorer la résistance mécanique d’un terrain, pour faciliter les excavations ou la traversée des zones de franchissements difficiles lors du creusement de galeries ou augmenter la portance générale d’un massif de fondation. Elle permet aussi de consolider les fondations d’ouvrages mitoyens qui peuvent être déstabilisées par l’excavation d’une fouille à proximité.
ÉTANCHEMENT
L’objectif est de créer des écrans (verticaux ou horizontaux), limitant les circulations d’eau dans le terrain (écran étanche sous un barrage) ou des fonds étanches (lorsque le substratum étanche naturel est trop profond).
SCELLEMENT
Ce type d’injection consiste à sceller au sol, sous pression, une armature métallique (barre, câble de précontrainte, tube profilé, etc.) pour obtenir une haute capacité d’arrachement ou de chargement sur cette armature.
REMPLISSAGE
Il est destiné, par exemple, à combler les cavités naturelles du terrain (remplissage de carrières souterraines) ou artificielles tels des vides annulaires.
COMPENSATION
La compensation permet, lors du creusement par exemple de tunnels, en injectant le sol situé au-dessus de l’ouvrage, de limiter et de compenser les tassements résultant du déconfinement du terrain.
On distingue trois modes d’injection :
- l’injection par imprégnation des vides existants par un coulis fluide ;
- l’injection par claquage du massif et remplissage par un coulis fluide.
C’est l’injection sous pression qui provoque l’ouverture des fissures dans lesquelles se place le coulis ;
- l’injection par serrage d’un coulis épais.
La composition du coulis à utiliser est fonction de la nature et de la
porosité du terrain et du type d’injection. Les principaux coulis utilisés sont à base de ciment ou de mélange ciment et bentonite. L’injection est réalisée à l’aide de matériels spécifiques comprenant une centrale de préparation du coulis, les centrales et pompes d’injection et les tubes d’injection (à obturateur simple, à manchettes, etc.).
Les opérations d‘injection sont précédées d’un forage préalable du terrain.
Parois moulées
Les parois moulées sont des ouvrages de fondations en béton armé, utilisées comme structure définitive pour la réalisation de nombreux ouvrages. Ancrées dans une couche résistante étanche, elles permettent d’excaver en toute sécurité sous la nappe phréatique. Les parois moulées assurent simultanément trois fonctions : soutènement, portance et étanchéité.
La technique se prête à la réalisation d’une grande diversité d’ouvrages dans des sites et des conditions géotechniques très variés. Elle permet de réaliser des ouvrages de formes et de dimensions diverses jusqu’à des profondeurs très importantes :
- parois de soutènement pour murs latéraux de tranchées couvertes, de parkings souterrains, de murs de quai ;
- parois circulaires pour la réalisation de bassins d’orage, de puits de ventilation de tunnels ;
- grandes fouilles en site urbain en présence ou en absence de nappe phréatique ;
- puits et enceintes cylindriques de grand diamètre à forte profondeur ;
- tranchées en site urbain à l’air libre ou enterrées : voies autoroutières ou routières, voies ferrées ou collec- teurs ;
- gares souterraines ;
- fondations profondes et porteuses ;
- bassins de rétention d’eaux pluviales (paroi circulaire ancrée dans un substratum étanche).
La technique de réalisation de la paroi moulée comprend plusieurs phases :
- la réalisation d’une prétranchée (protégée par une «murette» guide de 1 m à 1,50 m de hauteur) qui garantit le nivellement de la paroi, assure la stabilité des terres en surface et sert de guide à l’outil de perforation ;
- la perforation du sol sous boue bentonitique à l’aide de bennes suspendues à un câble ou à un «kelly» ou bien à l’aide de fraises hydrauliques.
Les dimensions des panneaux vont de 0,50 m à 1,50 m d’épaisseur, quelques mètres de largeur (3 à 7 m) et de 10 à 100 m de profondeur. La boue, ou fluide de forage (coulis à base de bentonite et d’eau), est produite par une centrale de fabrication installée sur le chantier.
Elle est déversée en continu dans l’excavation au fur et à mesure de son avancement pour en assurer la stabilité. On opère généralement par panneaux juxtaposés, en alternant panneau primaire et panneau secondaire (panneau primaire perforé en terrain vierge, panneau secondaire perforé entre deux panneaux primaires déjà perforés).
- Curage du panneau par dessablage de la boue en circulation.
- Mise en place des cages d’armatures et des dispositifs de joint (joints waterstop) : les cages d’armatures sont préfabriquées par éléments de 12 à 14 m de longueur.
- Bétonnage par tube plongeur : le béton est mis en place à l’aide d’un tube plongeur (en continu sans interruption) à partir du fond de la tranchée. Le tube plongeur est remonté au fur et à mesure du remplissage.
La boue est simultanément extraite par pompage et recyclée.
Les matériels modernes de réalisation des parois moulées permettent de contrôler en continu l’épaisseur, la verticalité et le déplacement latéral de la tranchée en cours d’excavation. La réalisation de parois moulées dans le sol implique un bétonnage au tube plongeur sous la boue, ce qui entraîne un certain nombre de contraintes :
- la densité d’armatures ne doit pas être trop élevée, de manière à en garantir un bon enrobage ;
- le béton doit conserver son ouvrabilité pendant toute la durée du bétonnage.
Nota : il est recommandé d’utiliser un dosage en ciment supérieur à 350 kg/m3 pour conférer au béton une meilleure rétention d’eau.
Lorsque la paroi ne doit pas assurer un rôle structurel mais plutôt une fonction d’étanchéité, le béton utilisé est un béton plastique obtenu par incorporation de bentonite (dosage courant en ciment 100 à 200 kg/m3 et en bentonite 25 à 100 kg/m3).
La bentonite permet de produire un béton déformable, sans ségrégation, avec des coefficients de perméabilité faibles (inférieurs à 10-8 m/s).
D’autres types de parois
LES PAROIS BERLINOISES
Cette technique de soutènement provisoire (en l’absence de la nappe phréatique) consiste, avant excavation de la tranchée, à sceller dans le terrain des profilés métalliques (espacement de 2 à 4 m)
le long du périmètre ceinturant la future fouille, puis à terrasser en blindant le parement de la fouille au fur et à mesure, au moyen de plaques s’appuyant sur les profilés. Ceux-ci sont mis en place dans des forages de gros diamètres creusés à la tarière et scellés avec du béton ou avec un coulis de ciment jusqu’à un niveau situé sous le fond de fouille future. Le blindage est constitué de dalles en béton ou de béton projeté mis en place progressivement entre les poteaux. Dès que la hauteur de soutènement dépasse quelques mètres, la stabilité de la paroi est assurée en ancrant les profilés métalliques par un ou plusieurs lits de tirants ou par butonnage.
Nota : il existe diverses variantes de cette technique, notamment la paroi «parisienne», dans laquelle le profilé est un poteau préfabriqué en béton avec des armatures en attente, qui peuvent être ultérieurement déployées et liaisonnées au soutènement. On peut ainsi réaliser une paroi à caractère définitif.
LES PAROIS CLOUÉES
Des barres d’acier (clous) sont scellées dans des forages quasi horizontaux, préalablement creusés dans le terrain, au moyen d’un coulis ou d’un mortier de ciment. Des treillis soudés sont fixés au parement de la fouille et renforcés au droit des clous. Un voile de béton, d’une épaisseur courante de 15 à 20 cm, est ensuite réalisé en béton projeté. L’excavation de la fouille se fait de haut en bas, par phases successives correspondant à quelques mètres de hauteur.
Cette technique, souple d’emploi et économique, permet d’assurer un soutènement provisoire des fouilles dans tous les types de terrains en l’absence d’eau.
La bentonite
La bentonite est une variété particulière d’argile (de la famille des smectites) qui se présente sous forme de poudre fine. Les particules de bentonite sont constituées d’assemblages de feuillets parallèles.
En présence d’eau, et notamment en suspension, les molécules d’eau se fixent entre les plaques des feuillets chargés électriquement et séparés par un cation métallique, ce qui provoque, en particulier, le gonflement important du grain de bentonite.
Les suspensions de bentonite présentent des propriétés particulières :
■ aptitude à développer de la viscosité ;
■ aptitude à former, de manière réversible, un «gel» (thixotropie) ;
■ aptitude à constituer un seuil d’écoulement ;
■ propriétés colmatantes (aptitude à former un «cake» par filtration) ;
■ propriétés liantes et agglomérantes.
Il existe plusieurs variétés de bentonite régulièrement employées
pour la réalisation de nombreuses techniques de fondations spéciales (forage de pieux ou de barrettes, exécution de parois moulées ou d’écrans étanches, creusement de tunnel, injection de consolidation de sol, etc.), sous forme de fluide de perforation, fluide de forage ou en mélange avec du ciment.
Pour le creusement d’une tranchée ou le forage d’un pieu, la stabilité du terrain est assurée par une boue de bentonite. La poussée hydrostatique de cette boue compense la poussée des terrains et des eaux de la nappe phréatique. L’application de cette poussée sur le terrain est rendue possible grâce à la formation sur la paroi de l’excavation d’un film étanche, le «cake», constitué soit par les particules de bentonite accumulées par le phénomène de filtration (cas des sols peu perméables), soit par une frange de sol imprégnée de boue bentonitique (cas des sols perméables).
Lorsque l’on colmate un sol avec un coulis de bentonite, on obtient un matériau souple, plastique et présentant une très faible perméabilité.
Écrans étanches
Les écrans étanches sont des structures enterrées destinées à réduire, empêcher ou détourner des écoulements souterrains ou établir une coupure imperméable pour isoler un site. Ils sont utilisés à titre provisoire ou définitif pour réaliser soit des ouvrages hydrauliques, soit des ouvrages de protection de l’environnement.
DES COULIS AUTODURCISSABLES À BASE DE BENTONITE ET DE CIMENT
Les écrans étanches sont réalisés à l’aide de coulis autodurcissables à base de bentonite et de ciment, dans des terrains généralement alluvionnaires (sols meubles de faible compacité, hétérogènes, perméables) en présence d’une nappe aquifère. Ils peuvent être linéaires (pour réaliser l’étanchéité de barrage ou de cours d’eau) ou circulaires (pour réaliser, par exemple, des enceintes fermées destinées à mettre hors d’eau une fouille ou isoler une zone polluée). Ils doivent être étanches, résistants, tout en étant déformables (afin de suivre les mouvements de terrain sans se fissurer) et pérennes sous l’action de l’eau de la nappe phréatique.
La technique consiste à réaliser une tranchée en continu en utilisant, comme fluide de perforation, le coulis bentonite-ciment qui, en se substituant au sol, formera après durcissement l’écran définitif.
Les écrans étanches (d’épaisseur courante 0,50 m) sont mis en place principalement pour deux types d’application : la réalisation de barrières étanches à la migration des eaux souterraines ou d’enceintes de confinement de zones polluées.
Leur profondeur peut atteindre jusqu’à 100 m.
Les barrières étanches sont utilisées pour la construction de tranchées couvertes, de parkings, de station de métro, de piles de pont, de quais ou d’écluses. Dans ce cas, elles assurent un rôle provisoire en permettant la réalisation des ouvrages à l’abri de la nappe phréatique. Elles peuvent être utilisées à titre définitif pour assurer l’étanchéité de digues, de rivières, de canaux ou de barrages. L’étanchéité complète de l’écran est garantie en le prolongeant et en assurant un ancrage dans une couche inférieure imperméable.
Les enceintes de confinement servent à protéger une zone polluée telle que des décharges ou des sites industriels. Ancrées dans un substratum naturellement étanche ou rendu étanche, elles ceinturent la zone en stoppant la migration et la dispersion des polluants vers les sols ou les eaux souterraines avoisinantes. Les coulis autodurcissables destinés à la réalisation d’écrans étanches sont constitués d’un mélange de ciment (en général un
CUEM III), de bentonite spécialement adaptée pour la stabilisation de suspension, comportant du ciment et de l’eau avec ajout éventuel d’adjuvants (afin d’adapter le coulis aux conditions particulières de chantier, fluidification, retard de prise, réduction de l’essorage, etc.).
Nota : les ciments de type CEM III
présentent une bonne résistance aux agressions chimiques éventuelles des eaux et du sol et un développement de résistance adapté aux contraintes d’exécution de la technique.
LES COULIS OFFRENT DES PROPRIÉTÉS SPÉCIFIQUES À L’ÉTAT FRAIS ET À L’ÉTAT DURCI
La composition du coulis bentoniteciment doit être optimisée en fonction du type d’écran à réaliser (spécifications relatives à la perméabilité et la résistance), des caractéristiques des terrains traversés et des contraintes de mise en œuvre sur chantier. Le principe de formulation vise à optimiser les proportions relatives des constituants et la concentration du mélange de liant dans le coulis afin d’obtenir le meilleur compromis entre ouvrabilité, résistance, perméabilité et déformabilité. La nature et le dosage en ciment sont déterminés par des exigences d résistance et de déformabilité. La viscosité et le pouvoir anti-essorant du coulis à l’état frais sont ajustés en optimisant le dosage en bentonite.
Nota : l’augmentation du dosage en ciment améliore la résistance du coulis durci au détriment de l’ouvrabilité de la suspension lors de l’excavation. L’augmentation du dosage en bentonite améliore la perméabilité de l’écran et réduit la sédimentation et la ségrégation du coulis en phase liquide. Une teneur insuffisante en bentonite conduit à une suspension instable, une teneur trop élevée à une mauvaise ouvrabilité.
Des fillers ou des cendres volantes sont parfois utilisés afin d’augmenter la masse volumique du coulis ou améliorer sa rhéologie à l’état frais.
Les dosages courants sont compris pour le ciment entre 150 et 300 kg/m3 de coulis et pour la ben- tonite (de type sodique) entre 20 et 50 kg/m3 de coulis.
Le coulis autodurcissable joue un double rôle :
- un rôle de boue stabilisatrice à l’état frais assurant la stabilité de la tranchée pendant son creusement ;
- un rôle de matériau rigide et peu perméable constituant la paroi après la prise de ciment.
Le coulis à l’état frais doit être fluide,
stable, homogène, ne présenter aucune sédimentation ou ségrégation et équilibrer les pressions exercées par le sol. Ces propriétés sont obtenues grâce aux caractéristiques rhéologiques offertes par la bentonite. Elle maintient en suspension les grains de ciment et garantit la cohésion du mélange. Le coulis doit conserver ses caractéristiques pendant les phases de fabrication, de stockage, de circulation dans les conduites d’alimentation et d’injection dans la tranchée.
À l’état durci, le coulis doit présenter des performances mécaniques suffisantes pour garantir la résistance de l’écran mais pas trop importantes pour que l’écran, présente un module d’élasticité et des caractéristiques de déformation voisins de ceux du sol et puisse accepter d’éventuels mouvements du terrain (des résistances mécaniques de quelques MPa sont en général spécifiées).
Ces performances mécaniques ainsi que la pérennité, la nonérodabilité de l’écran, et la résistance aux agressions éventuelles du sol sont obtenues en optimisant le type de ciment et son dosage. Mais l’écran doit être aussi étanche (perméabilité inférieure à 10-9 m/s), cette propriété étant assurée en particulier par les caractéristiques spécifiques de la bentonite.
Nota : pour la détermination de la composition pondérale du coulis (poids des constituants pour réaliser un mètre cube de coulis), les masses spécifiques à prendre en compte sont de l’ordre de 3,0 pour le ciment et 2,3 pour la bentonite.
UNE CONTINUITÉ PARFAITE DE L’ÉCRAN ET DE L’ÉTANCHÉITÉ
Les coulis sont fabriqués dans des centrales spécifiques de chantier composées de silos de stockage du ciment et de la bentonite, de cuves de malaxage et de stockage des boues et de systèmes d’injection.
La fabrication est réalisée en deux étapes. La première consiste à préparer la boue primaire (mélange de bentonite et d’eau) par malaxage (la mise en suspension des particules fines de bentonite exige un malaxage à cisaillement élevé), puis par stockage dans des cuves pendant une durée comprise entre 6 et 24 heures afin de permettre le « mûrissement » de la bentonite. La deuxième étape consiste à incorporer le ciment dans la boue primaire par malaxage. Le coulis obtenu est maintenu ensuite en agitation dans une cuve d’attente avant d’être pompé vers la tranchée.
Les caractéristiques du coulis à l’état frais sont évaluées à l’aide de quatre principaux essais. La viscosité est contrôlée au moyen d’un cône de Marsh, en mesurant le temps nécessaire à l’écoulement d’un litre de coulis à travers un ajutage de dimension déterminée (les valeurs courantes sont de l’ordre de 35 à 45 secondes). La tendance à l’essorage est mesurée à l’aide d’un filtre presse, la masse volumique à l’aide d’une balance à boue, la stabilité par mesure du volume d’eau « surnageante » obtenue par décantation de l’échantillon dans une éprouvette graduée.
La tranchée est creusée à l’aide de matériels utilisés en travaux de fondations spéciales (benne à câbles ou fraise hydraulique). L’excavation peut être réalisée soit par tronçons alternés (écrans constitués de panneaux creusés alternativement), soit en continu (panneaux creusés les uns à la suite des autres). Elle descend en général jusqu’à un substratum imperméable (par exemple, une couche argileuse). Le coulis est introduit par déversement gravitaire dans la tranchée simultanément à l’excavation et se substitue au sol prélevé.
Cette technique permet d’obtenir une continuité parfaite de l’écran et donc de l’étanchéité.
Les écrans étanches n’ont pas un rôle structurel. Leur résistance mécanique doit être suffisante pour supporter leur poids propre, résister
aux contraintes du sol en profondeur et à des écoulements sous fort gradient. Une résistance en compression simple inférieure à 1 MPa permet de conserver une déformabilité satisfaisante de la paroi.
L’étanchéité des écrans est caractérisée par le coefficient de perméabilité K, en m/s (K correspond à la quantité d’eau traversant l’unité de section pendant l’unité de temps sous un gradient hydraulique défini).
Les spécifications courantes sont fonction de la nature de l’écran (K compris entre 10-7 et 10-9 m/s pour les ouvrages hydrauliques et K compris entre 10-8 et 10-10 m/s pour les ouvrages de protection de l’environnement).
Le coefficient de perméabilité est mesuré sur un échantillon de matériau prélevé soit à la centrale de fabrication du coulis, soit par carottage au sein de l’écran après durcissement. Il est déterminé à l’aide d’une cellule d’étanchéité triaxiale. en mesurant le volume d’eau de percolation à travers l’échantillon.
La perméabilité globale de l’écran peut être mesurée in situ par des différences de niveau piézométrique de part et d’autre de l’écran ou par des essais de pompage.
Il est possible de diminuer considérablement la perméabilité d’un tel écran par introduction dans le coulis, en fin d’excavation, avant sa prise, de feuilles de PEHD (polyéthylène à haute densité). Ces feuilles, d’une épaisseur de quelques millimètres, de 1 à 2 m de largeur et de longueur, correspondant à la profondeur de l’écran, permettent d’obtenir un écran présentant une très faible perméabilité et une très bonne résistance aux agressions chimiques, en particulier aux hydrocarbures. La continuité entre les feuilles est assurée par la mise en place,
dans une clef prévue à cet effet, d’un cordon hydrogonflant.
L’ÉCRAN MINCE
Dans certaines conditions, un écran étanche peut être réalisé avec la technique dite de l’« écran mince ».
Cette technique consiste à foncer, à l’aide d’une vibrofonceuse, un profilé métallique (IPN de 50 à 80 cm de largeur et de 10 à 25 m de longueur) jusqu’à la profondeur voulue, puis à injecter sous pression le coulis autodurcissable à base de bentonite-ciment en remontant progressivement le profilé. La stabilité de l’excavation est assurée par le profilé à l’enfoncement et par le coulis à l’extraction. La machine est ensuite avancée de la largeur du profilé pour une deuxième passe.
L’empreinte laissée dans le sol sert de guide pour le fonçage suivant. La répétition des fonçages permet d’obtenir un voile continu par remplissage de la saignée laissée par le profilé à la remontée et également par l’imprégnation par le coulis d’une zone proche du voile.
Cette imprégnation, dont l’importance varie avec la compacité du sol, permet d’améliorer la continuité du voile, donc son efficacité. La bonne exécution de l’écran est conditionnée par la vitesse de remontée du vibreur et la composition du coulis.
Cette technique par fonçage est particulièrement adaptée, compte tenu de sa facilité de mise en œuvre et sa rapidité d’exécution, à des problèmes de pollution nécessitant l’isolation rapide d’un site. Elle est réalisée sans extraction de sol.
En revanche, son domaine d’utilisation est limité aux sols formés d’alluvions à faible compacité et ne contenant pas d’élément supérieur à 50 – 100 mm.
L’écran de faible épaisseur n’a pas de résistance mécanique importante mais il s’oppose aux déformations naturelles du terrain et aux pressions hydrostatiques.
Jet grouting
Le jet grouting est un procédé de consolidation de sol qui consiste au traitement du sol dans la masse par injection sous haute pression d’un jet de coulis à base de ciment, réalisant in situ un mélange sol-ciment.
Cette technique est couramment utilisée sur de nombreux chantiers de fondations spéciales.
La technique de réalisation se décompose en deux étapes principales :
- la réalisation d’un forage dans le sol (de diamètre de l’ordre de 120 à 150 mm) sur la hauteur du terrain à consolider et la mise en place dans le forage d’un train de tiges creuses (de diamètre 60 à 90 mm) équipé, en pied, de buses d’injection et, en partie haute d’une tête d’alimentation rotative ;
- l’injection du coulis sous haute pression au travers de buses de petits diamètres par remontée et rotation simultanée du train de tiges.
Le jet de coulis déstructure le terrain par l’effet dynamique généré par sa grande vitesse et, grâce au mouvement combiné de rotation et de remontée, le coulis se mélange intimement au terrain en place et crée, du bas vers le haut, une colonne de sol-ciment. Cette colonne de forme cylindrique peut atteindre jusqu’à 2 m de diamètre.
UN BÉTON DE SOL
Les performances de ce «béton de sol» dépendent des caractéristiques et de la nature du terrain en place et des paramètres de traitement.
Il existe trois types de procédés de jet grouting. Le jet simple qui utilise un seul jet de coulis de ciment. Le jet double pour lequel le jet de coulis de ciment est associé simultanément à un jet d’air, ce qui permet d’augmenter le rayon d’action et l’effet de destruction et de malaxage du sol. Le jet triple, quant à lui, combine un jet d’eau qui déstructure le sol, à un jet d’air pour en améliorer l’efficacité, puis à un jet de coulis de ciment apportant la quantité de liant nécessaire à la réalisation du mélange sol-ciment.
Le type de technique est choisi en fonction des caractéristiques du terrain à consolider, du diamètre des colonnes à réaliser (de 80 cm à 200 cm) et des performances souhaitées. Ce procédé de traitement hydrodynamique des sols s’applique à des terrains meubles, pas ou difficilement injectables par des procédés classiques d’injection tels que les sols fins (limons et argiles sableuses) ou injectables tels que les sables, les alluvions grossières. Il permet de réaliser des colonnes de fondation (de bâtiments ou de structures de Génie Civil), des massifs de fondation (renforcement d’un massif de sol dans la masse), des parois continues, des écrans ou des puits (par juxtaposition de colonnes de jet copénétrantes).
DE MULTIPLES APPLICATIONS
Ce procédé est d’une grande souplesse d’utilisation. Il peut être utilisé à partir de forages verticaux ou inclinés de petits diamètres pour des applications particulières, telles que, par exemple, le présoutènement par voûtes parapluies, lors du creusement de galeries ou de tunnels, la fermeture de fenêtres localisées dans des rideaux de palplanches ou des parois moulées, la réalisation de mur de soutènement en présence d’obstacles enterrés, la consolidation de terrain derrière des ouvrages existants fragiles ou instables, la confection de butée en pied de parois moulées ou de palplanches fichées dans un terrain médiocre, la reprise de bâtiment en sous-œuvre, le soutènement de talus, la stabilisation de mur de quai.
Les spécificités de cette technique nécessitent, en général, l’utilisation d’un ciment à forte teneur en laitier, offrant une faible chaleur d’hydratation, une cinétique de prise lente et une bonne résistance aux agressions éventuelles des eaux pures et des eaux sulfatées.
L’atelier de jet grouting se compose d’une centrale de fabrication du coulis, comprenant les silos de stockage de ciment et les systèmes de malaxage et de pompage. La centrale est reliée par une conduite à une foreuse mobile, montée en général sur chenilles.
Le diamètre et la résistance mécanique de la colonne de «sol-ciment» obtenue sont fonction de la méthode de jet (simple, double ou triple), des paramètres de traitement (débit des jets, vitesse de rotation et de translation des tiges, énergie de jet…), de la nature et des caractéristiques géométriques du terrain (granulométrie, compacité, cohésion…), du dosage en ciment du coulis d’apport.
Il est indispensable de réaliser, avant le démarrage des travaux, des colonnes d’essais qui permettent d’apprécier la faisabilité du traitement, le diamètre des colonnes et la résistance mécanique du « sol-ciment ». Après réalisation des colonnes, des carottages et des forages permettent de contrôler la géométrie du traitement réalisé et les résistances mécaniques.
Les matériels de perforation
Divers matériels de perforation sont utilisés en fonction de la nature du terrain, de la technique et du projet à réaliser. Ces dernières années, sous la pression de contraintes environnementales et économiques, ces matériels ont particulièrement évolué, devenant plus fiables, plus compacts, plus précis et moins bruyants, avec des rendements supérieurs. Ils sont informatisés et robotisés, et équipés de système de correction automatique de trajectoire et d’appareils de contrôle permet- tant d’enregistrer en continu les paramètres d’exécution.
Tarière : matériel utilisé pour la réalisation de pieux.
Benne preneuse à câbles : matériel constitué par des grappins mécaniques ou hydrauliques suspendus à des câbles et montés sur une grue (ou une pelle) à chenilles.
Benne kelly : matériel constitué par une benne preneuse fixée à l’extrémité d’une tige télescopique de 20 à 50 m de longueur, maintenue en position verticale par un guide. L’ensemble est porté par une grue à chenilles.
Fraise hydraulique : machine (à descente continue contrairement aux bennes qui sont à descente et remontée alternées) portée par une pelle sur chenilles, constituée d’un bâti rigide (guide) équipé à son extrémité de deux tambours (fraise) tournant en sens inverse (les pics équipant les tambours permettent de désagréger le terrain). Une pompe située juste au-dessus des tambours assure l’évacuation des déblais (mis en suspension dans la boue de forage circulant en sens inverse). La boue de forage (à base de bentonite), criblée et filtrée en continu dans une station de traitement, alimente la saignée en surface. Elle permet, en maintenant le terrain, la mise en place des cages d’armatures et le bétonnage dès la fin de la perforation. Cette machine est utilisée pour forer des barrettes ou des éléments de paroi moulée à de très grandes profondeurs (jusqu’à 125 m) dans une vaste gamme de terrains (des sols pulvérulents aux roches dures).
Exigences sur les bétons selon la norme NF EN 2016/CN
La norme NF EN 2016/CN fournit dans son annexe D des exigences complémentaires relatives à la spécification et à la conformité du béton utilisé pour :
- les pieux forés ;
- les parois moulées ;
- les pieux avec refoulement de sol exécutés en place ;
- les micropieux.
Les ciments pouvant être utilisés sont cités dans l‘article 5.1.2. et NA 5.1.2.
Leurs performances, en particulier vis-à-vis du maintien de la rhéologie, doivent être validées pour les conditions particulières d’utilisation.
La formulation du béton doit prendre en compte la nécessité :
- d’une grande résistance à la ségrégation ;
- d’une plasticité et d’une consistance adéquates ;
- d’un écoulement facile ;
- d’une maniabilité suffisante pendant toute la durée du bétonnage.
La norme spécifie la teneur minimale en fines et la teneur minimale en ciment pour certains types d’application.
La teneur minimale en ciment, par exemple pour les bétons destinés à la réalisation de parois moulées pour un Dmax de 22,4 mm, est de 380 kg/m3.
La norme précise des valeurs cibles de consistance du béton frais selon différentes conditions d’utilisation.